Malgré un contexte juridique très incertain, les boutiques spécialisées dans les produits à base de CBD se multiplient dans les grandes villes de la région.
Décidément, le phénomène du cannabidiol ne faiblit pas malgré un contexte législatif décourageant pour les professionnels. L’Occitanie n’échappe pas à l’engouement, et les boutiques spécialisées dans les produits à base de CBD fleurissent dans les grandes villes de la région.
Le CBD prospère à Toulouse, Castres, Montauban et Albi
A l’image des autres régions de l’Hexagone, l’Occitanie voit éclore des boutiques spécialisées dans la vente de produits à base de cannabidiol (CBD) un peu partout dans les grandes villes. Si Toulouse se taille la part du lion avec une vingtaine de boutiques (dernier recensement en 2021), des villes comme Montauban, Muret ou encore Albi sont concernés. La commune de Castres, à 77 km à l’est de Toulouse, a même vu l’ouverture de 6 boutiques spécialisées dans les produits à base de CBD en 2021 selon Francebleu.com. Ce phénomène rappelle l’émergence soudaine des boutiques spécialisées dans la vente des cigarettes électroniques ou vaporettes au milieu des années 2010.
Le CBD est un extrait du chanvre largement utilisé dans l’industrie textile, les cosmétiques et même le secteur du bâtiment, où l’on recherche ses propriétés isolantes. Contrairement au THC, autre composante du chanvre, le CBD n’est pas une molécule psychotrope. Si elle est plébiscitée par les consommateurs, c’est qu’elle présenterait des vertus relaxantes et des propriétés anti-inflammatoires. Les boutiques spécialisées commercialisent essentiellement de la fleur, de la résine et de l’huile de CBD, mais le marché tend à se diversifier avec des produits plus originaux comme le chocolat noir au CBD, les chewing-gums au cannabidiol, les boissons énergisantes, les infusions, les cookies, les e-liquides pour cigarette électronique et même des produits à base de CBD pour les animaux domestiques !
A l’odeur, il est quasiment impossible de distinguer le CBD de l’herbe de cannabis illicite. Et pourtant, la composition chimique présente une différence majeure : le CBD ne contient pas, ou très peu de THC, molécule responsable de l’effet psychotrope du cannabis et qui justifie son interdiction, du moins pour un usage récréatif.
Malgré la légalité, le secteur craint toujours l’interdiction
Malgré le sourire des vendeurs et la bonne humeur des patrons de boutique, le marché du CBD navigue à vue. Il a même failli disparaître en début d’année. En effet, un arrêté ministériel rendu public le 31 décembre 2021 avait tout simplement interdit toute commercialisation des fleurs et feuilles de CBD, menaçant près de 70 000 emplois de disparition imminente et quelque 2 000 boutiques de dépôt de bilan. Furieux mais aussi solidaires, les professionnels du secteur avaient aussitôt saisi le Conseil d’Etat pour contester cette décision.
Le 24 janvier 2022, soit à peine trois semaines après l’arrêté controversé, la plus haute juridiction administrative leur a donné raison, suspendant provisoirement l’interdiction. Le juge des référés du Conseil d’Etat a en effet rappelé que le seuil réglementaire (THC < 0,3 %) garantit que les produits à base de CBD sont dépourvus de toute propriété stupéfiante.
Mais tout n’est pas gagné pour les commerçants du secteur, car la suspension n’est, par définition, que provisoire, le temps que l’institution se prononce définitivement sur la question. Concrètement, les professionnels du secteur devront sans doute ajourner tout projet d’expansion, d’ouverture de nouvelles boutiques, de diversification et d’approvisionnement sur le long terme pour ne pas perdre les fonds engagés. Mais le marché français présente également des avantages pour les professionnels. En effet, le coût matière y est particulièrement compétitif, dans la mesure où la France produit la moitié du chanvre européen avec une surface cultivée de plus de 18 000 hectares, très loin devant l’Italie et les Pays-Bas. Cette abondance facilite l’approvisionnement de CBD pas cher en gros pour les revendeurs et permet un taux de marge relativement élevé, estimé entre 15 et 35 %.
Malgré l’incertitude juridique, les signaux semblent au vert. Le ministre de la Santé Olivier Véran a récemment donné le coup d’envoi de la première expérimentation de cannabis médical à grande échelle dans l’Hexagone, assistant même à la première prescription du genre pour un patient atteint d’épilepsie dans le CHU de Clermont-Ferrand. Aussi, certains candidats à l’élection présidentielle ont exprimé publiquement leur soutien au cannabidiol (Yannick Jadot, candidat d’Europe Ecologie – Les Verts), voire à la légalisation du cannabis (Jean-Luc Mélenchon, candidat La France Insoumise). Pendant ce temps, le Royaume-Uni vient d’inscrire les produits à base de CBD dans la catégorie des « aliments », autorisant donc leur commercialisation auprès du grand public…