Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) a dénoncé dans un rapport rendu public ce mercredi à Genève une campagne de répression systématique contre les Rohingyas qui a été conçue pour expulser définitivement la minorité musulmane de l’Etat Rakhine.
« Les attaques brutales contre les Rohingyas dans la partie septentrionale de l’Etat Rakhine ont été bien organisées, coordonnées et systématiques, avec l’intention non seulement de pousser la population en dehors du Myanmar, mais aussi de les empêcher de revenir chez elle », note le rapport.
une campagne militaire destinée à expulser définitivement les Rohingyas
Les conclusions de l’enquête sont basées sur des entretiens avec des réfugiés arrivés au Bangladesh entre le 14 et le 24 septembre. Cette enquête montre que la dernière vague d’opérations militaires de nettoyage dans cet Etat de l’ouest du pays a en fait commencé avant le 25 août, peut-être début août, ce qui contredit les affirmations des autorités de Naypyidaw selon lesquelles la campagne de répression visait uniquement à répondre aux attaques de rebelles rohingyas le 25 août dernier. De façon générale, les enquêteurs ont dessiné les grandes lignes d’une campagne militaire destinée à expulser définitivement les Rohingyas du Myanmar, où ils souffrent de persécutions depuis des décennies.
« en abattant parfois à bout portant et dans le dos ceux qui s’enfuyaient »
Les enquêteurs ont également reçu des témoignages sur des meurtres, des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées, des violences sexuelles, des cas de torture et d’attaques contre des lieux de culte. D’après les témoignages recueillis, les forces de sécurité se sont rendues coupables d’exactions, « en abattant parfois à bout portant et dans le dos ceux qui s’enfuyaient ». En outre, des données crédibles montrent que les propriétés et des villages entiers des Rohingyas ont été volontairement détruits par les forces de sécurité et des individus bouddhistes. Des violences « pas seulement pour faire fuir la population massivement mais aussi pour empêcher les victimes rohingyas de revenir chez elles », font remarquer ces enquêteurs de l’ONU.
un retour « quasiment impossible »
Selon le HCDH, un retour semble « quasiment impossible » tant les destructions ont ciblé des maisons, des zones agricoles, des stocks alimentaires ou même du bétail. « Des efforts ont été entrepris pour effectivement effacer des repères dans la géographie du paysage et de la mémoire rohingya de telle façon qu’un retour sur leurs terres n’aboutirait à rien d’autre qu’un terrain désolé et méconnaissable », a souligné cette équipe de trois membres du HCDH.
Dans certains cas, avant et pendant les attaques, des mégaphones ont été utilisés pour annoncer : « Vous n’êtes pas d’ici – allez au Bangladesh. Si vous ne partez pas, nous allons brûler vos maisons et vous tuer », a indiqué l’ONU dans son rapport.
Par ailleurs, « des enseignants, ainsi que des responsables culturels, religieux et communautaires ont également été visés dans la récente campagne de répression » avec la volonté de rabaisser « l’histoire, la culture et les connaissances des Rohingyas », poursuit le rapport.
Après la contre-offensive de fin août de l’armée du Myanmar, le Haut-Commissaire aux droits de l’homme, Zeid Raad al-Hussein, avait estimé que la répression récente ressemblait à un « modèle de nettoyage ethnique ». Au total, plus de 520.000 réfugiés rohingyas sont arrivés depuis un mois et demi au Bangladesh.