La Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) recense les graves violations des droits de l’homme commises par les autorités de facto, notamment les exécutions sommaires, les mauvais traitements et les disparitions forcées d’anciens membres des forces de sécurité nationales afghanes. Le document décrit également comment « les arrestations et les détentions arbitraires de journalistes, de défenseurs des droits de l’homme et de manifestants ont eu un effet dissuasif sur la liberté des médias et l’activisme civique ».
Ce rapport peint une situation des droits de l’homme au cours des dix mois (15 août 2021 – 15 juin 2022) ayant suivi la prise de pouvoir par les Talibans. Il relate la série de décrets des talibans sur les droits des femmes et des filles qui ont donné lieu à « de graves restrictions de leurs droits fondamentaux, entraînant leur exclusion de la plupart des aspects de la vie quotidienne et publique ».
Le retour de la « police de la promotion de la vertu et prévention du vice »
Mais d’une manière générale, la mission onusienne se dit inquiète de « l’impunité avec laquelle les membres des autorités de facto semblent avoir commis des violations des droits humains ». L’ONU détaille ainsi les exécutions extrajudiciaires de personnes accusées d’affiliation à des groupes armés, ainsi que les châtiments et les exécutions extrajudiciaires de personnes accusées de crimes « moraux », mais aussi l’usage excessif de la force.
Au total, le rapport fait état de 160 exécutions extrajudiciaires, 178 arrestations et détentions arbitraires, 23 cas de détention au secret et 56 cas de torture infligés à d’anciens membres des forces afghanes et du gouvernement par les Talibans. Ces mêmes abus ont été infligés par des individus accusés d’être affiliées à Daech ou au « Front de résistance nationale ».
Le rapport met en évidence des préoccupations spécifiques concernant deux organes au sein des autorités de facto – le ministère de la Propagation de la vertu et de la Prévention du vice (Amr bil Maruf) et la Direction générale des renseignements de facto (Istikhbarat). Le rapport détaille les cas où l’Istikhbarat de facto a été impliqué dans la perpétration de violations contre des personnes sous leur garde, notamment des exécutions extrajudiciaires, des actes de torture, ainsi que des arrestations et des détentions arbitraires. Au moins 217 cas de châtiments cruels, inhumains et dégradants infligés par les autorités de facto depuis le 15 août 2021.
L’érosion des droits des femmes
Malgré une réduction globale et significative de la violence armée, entre la mi-août 2021 et la mi-juin 2022, la MANUA a enregistré 2.106 victimes civiles (700 tués, 1.406 blessés). La majorité des victimes civiles ont été attribuées à des attaques ciblées menées par le groupe armé auto-identifié « État islamique de la Province de Khorasan » contre des communautés ethniques et religieuses minoritaires.
« Il est plus que temps pour tous les Afghans de pouvoir vivre en paix et de reconstruire leur vie après 20 ans de conflit armé », a déclaré Markus Potzel, Représentant spécial par intérim de l’ONU pour l’Afghanistan.
Plus largement, si les autorités de facto ont pris certaines mesures comme l’amnistie accordée aux anciens responsables gouvernementaux et membres des forces de sécurité, l’érosion des droits des femmes est l’un des aspects les plus notables depuis plus d’un an. « Notre surveillance révèle qu’en dépit de l’amélioration de la situation sécuritaire depuis le 15 août, la population afghane, en particulier les femmes et les filles, est privée de la pleine jouissance de ses droits fondamentaux », a conclu M. Potzel, regrettant le sort des femmes et des filles contraintes de rester à la maison.