Le chef du maintien de la paix de l’ONU a fait part lundi de son inquiétude face aux risques de tensions supplémentaires sur le terrain, en particulier dans le nord du Kosovo.
S’exprimant devant le Conseil de sécurité, Jean-Pierre Lacroix, Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux opérations de maintien de la paix, a fait état d’un nombre de développements importants au Kosovo, lesquels ont ravivé les tensions entre Belgrade et Pristina.
Le 21 novembre, à la suite de l’échec du Kosovo à intégrer INTERPOL, le gouvernement du Kosovo a annoncé une hausse des tarifs des biens importés en provenance de la Serbie et de la Bosnie-Herzégovine, « de 10 à 100% ». En réponse, a indiqué M. Lacroix, les maires des quatre municipalités à majorité serbe du Kosovo ont annoncé leurs démissions et la décision de leurs assemblées municipales respectives de cesser toute communication officielle avec Pristina, a-t-il révélé. En outre, le principal parti politique serbe du Kosovo, la Liste serbe, a organisé des manifestations quotidiennes dans le nord de Mitrovica, qui ont réuni jusqu’à 5.000 personnes, a-t-il précisé.
De son côté, Belgrade a déclaré que Pristina avait violé l’Accord de libre-échange d’Europe centrale et souligné qu’elle ne reprendrait sa participation au dialogue facilité par l’Union européenne qu’une fois que Pristina aurait révoqué la taxe sur les importations. L’Union européenne a également exhorté le gouvernement du Kosovo en ce sens, le Représentant spécial du Secrétaire général exprimant à son tour sa préoccupation devant l’impact que cette taxe pourrait avoir sur la population du Kosovo et la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina.
« Dans cette atmosphère tendue », a noté le Secrétaire général adjoint, l’Assemblée du Kosovo a adopté, le 14 décembre dernier, trois lois, à savoir la Loi sur la Force de sécurité du Kosovo ; la Loi sur le Service dans la Force de sécurité du Kosovo ; et la Loi sur le Ministère de la Défense. Ces textes apportent des changements significatifs – qui seront mis en œuvre de manière échelonnée –, au mandat, au rôle et à la puissance de la Force. Le gouvernement du Kosovo a souligné son droit à avoir une armée, une force « multiethnique et professionnelle » alignée sur les critères les plus élevés de l’OTAN, a noté M. Lacroix.
Belgrade a condamné l’adoption de ces lois, qualifiées d’« agression politique » contre la Serbie, et de violation de la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité. De son côté, le Secrétaire général de l’OTAN, pour qui la transition de la Force de sécurité du Kosovo est en principe une question dont le Kosovo peut décider, a exprimé son regret devant la décision prise par l’Assemblée du Kosovo, qu’il a jugée « inopportune » et sans égard pour les préoccupations soulevées auparavant par l’OTAN, a relevé le Secrétaire général adjoint.
Le Secrétaire général de l’ONU a lui aussi noté avec préoccupation l’adoption de ces lois, soulignant que la résolution 1244 (1999) est le seul cadre juridique sur lequel est basé la présence internationale de sécurité, la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR), qui est chargée de garantir un environnement sûr et sécurisé au Kosovo.
Par conséquent, selon Antonio Guterres, « toute restriction à l’exercice par la KFOR de ses responsabilités en matière de sécurité serait incompatible avec cette résolution ». Le Secrétaire général, a poursuivi M. Lacroix, a demandé à toutes les parties concernées de faire preuve de retenue et de s’abstenir de toute action susceptible d’accroître les tensions et de provoquer un nouveau recul dans le dialogue facilité par l’Union européenne pour la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina.
« Il est donc crucial que Belgrade et Pristina s’abstiennent de toute mesure susceptible d’aggraver la situation, et réfléchissent plutôt aux moyens de s’engager dans le dialogue visant la normalisation de leurs relations », a dit M. Lacroix. La Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), a-t-il assuré, continuera ses activités prioritaires, dont le renforcement de la confiance intercommunautaire.