Le Conseil constitutionnel avait été saisi, dans les conditions prévues à l’article 61, deuxième alinéa, de la Constitution, de la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, le 15 février 2011. Les parlementaires de l’opposition soulevaient un grand nombre de d’irrégularités. Le Conseil constitutionnel a fait droit à leur demande et déclaré de nombreuses dispositions de cette loi voulue par Nicolas Sarkozy et présentée par son ancien ministre de l’intérieur Brice Hortefeux, inconstitutionnelles.
La décision du Conseil constitutionnel a été connue jeudi dans la soirée. Elle constitue un véritable camouflet pour le Président de la République Nicolas Sarkozy et son Premier ministre François Fillon. Véritable fusible, le ministre de l’intérieur qui avait présenté le texte, Brice Hortefeux avait été lui remercié la semaine dernière lors du remaniement ministeriel.
Les constitutionnalistes ont relevé que la loi LOPPSI 2 était la plus censurée par une décision des sages.
Voici les dispositions censurées par le juge constitutionnel :
L’article 18 complétait, en premier lieu, la liste des cas dans lesquels un dispositif de vidéoprotection peut être mis en oeuvre sur la voie publique par des autorités publiques. En second lieu, il assouplissait la mise en oeuvre de tels dispositifs par des personnes morales de droit privé et permettait de déléguer à des personnes privées l’exploitation et le visionnage de la vidéoprotection. Le Conseil constitutionnel a censuré ces secondes dispositions. Il a jugé qu’elles permettaient de confier à des personnes privées la surveillance générale de la voie publique et ainsi de leur déléguer des compétences de police administrative générale inhérentes à l’exercice de la « force publique ».
L’article 37-II étendait aux mineurs l’application de peines minimales (« plancher »). Ces peines étaient applicables à des primo-délinquants. Le Conseil constitutionnel a jugé ces dispositions contraires aux exigences constitutionnelles en matière de justice pénale des mineurs.
L’article 41 autorisait le procureur de la République à faire convoquer directement un mineur par un officier de police judiciaire devant le tribunal pour enfants sans saisir au préalable le juge des enfants. L’article 41 ne distinguait pas selon l’âge de l’enfant, l’état du casier judiciaire et la gravité des infractions poursuivies. Il ne garantissait pas que le tribunal aurait disposé d’informations récentes sur la personnalité du mineur. Il méconnaissait donc les exigences constitutionnelles en matière de justice pénale des mineurs.
L’article 43 institue la possibilité pour le préfet de prendre une décision de « couvre feu » pour les mineurs (de 23 heures à 6 heures). Le tribunal des enfants peut prononcer la même mesure à l’encontre d’un mineur. Ces dispositions sont conformes à la Constitution. En revanche, le paragraphe III de l’article 43 a été censuré. Il punissait d’une peine contraventionnelle le fait pour le représentant légal du mineur de ne pas s’être assuré du respect par ce dernier de ce « couvre feu » collectif ou individuel. Il permettait ainsi de punir le représentant légal pour une infraction commise par le mineur.
L’article 53 interdisait la revente, pour en tirer un bénéfice, grâce à internet, de billets d’entrée à une manifestation qu’elle soit culturelle, sportive ou commerciale, sans accord préalable des organisateurs. Cette mesure était fondée sur un critère manifestement inapproprié à l’objectif poursuivi d’éviter la présence de certains supporters lors de compétitions sportives. Dès lors elle méconnaissait le principe de nécessité des délits et des peines.
L’article 90 permettait au préfet de procéder à l’évacuation forcée de terrains occupés illégalement par d’autres personnes. Ces dispositions permettaient de procéder dans l’urgence, à toute époque de l’année, à l’évacuation, sans considération de la situation personnelle ou familiale, de personnes défavorisées et ne disposant pas d’un logement décent. Elle opérait une conciliation manifestement déséquilibrée entre la nécessité de sauvegarder l’ordre public et les autres droits et libertés.
L’article 92 étendait à des agents de police municipale la possibilité de procéder à des contrôles d’identité. Or ces agents, qui relèvent des autorités communales, ne sont pas mis à la disposition des officiers de police judiciaire, eux-mêmes placés sous le contrôle direct et effectif de l’autorité judiciaire. Dès lors, l’article 92 était contraire à l’article 66 de la Constitution qui impose que la police judiciaire soit placée sous la direction et le contrôle de l’autorité judiciaire.
L’article 101 permettait que des salles d’audience soient aménagées au sein des centres de rétention administrative. Cette mesure était inappropriée à la nécessité rappelée par le législateur de « statuer publiquement ». Elle était contraire à la Constitution.
Photo CC/Wikimedia/European People’s Party : Nicolas Sarkozy en
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COMMUNIQUE
DU
SYNDICAT DE DEFENSE DES POLICIERS MUNICIPAUX
Le Conseil constitutionnel relève que la police municipale ne dépend pas directement des officiers de police judiciaire, mais des autorités communales, ce qui semblerait ne pas accorder de garanties suffisantes à l’octroi du pouvoir de contrôles d’identité à ses agents et la qualité d’APJ aux directeurs.
Le Conseil Constitutionnel semble oublier que les Maires et leurs Adjoints, au titre de l’article 16 du Code de Procédure Pénale, mais aussi au titre du Code Général des Collectivités Territoriales, sont des Officiers de Police Judiciaire placés dans la hierarchie judiciaire, sous l’autorité du Procureur de la République.
Néanmoins, l’analyse du Conseil Constitutionnel a le mérite de démontrer qu’il est désormais acquis dans l’esprit du plus grand nombre que les Elus locaux, n’auraient pas de prérogatives en matière de police. En effet, depuis trop longtemps les Elus locaux ont délaissé la sécurité publique, qui est pourtant l’une de leurs prérogatives et responsabilités depuis des siècles.
Pourtant la sécurité est l’affaire de tous : les Maires sont aussi les représentants de l’Etat dans la commune, ils sont chargés de la police locale. Ils doivent donc participer à la sécurité, tranquillité et la protection de leurs administrés.
Pour une bonne cohérence, il est enfin nécessaire de clarifier et de réglementer les missions que l’Etat et les Maires ont l’obligation d’assurer en terme de sécurité publique.
La professionnalisation des polices municipales, passe inévitablement pas un développement de leur autonomie vis à vis des forces de police étatiques.
En conséquence de quoi, et ce conformément à sa plateforme de proposition, le SDPM propose la création de la police territoriale, où les responsables de police municipale auraient des compétences de police judiciaires accrues. Ils seraient alors, dans cette matière de police judiciaire, placés sous l’autorité du Procureur de la République et notés par lui, afin que leurs missions ne soient pas polluées par le volet politique de leur statut municipal.
Le corrolaire de ces mesures, qui correspond à la nécessaire création de la police territoriale, est l’ouverture d’une ECOLE NATIONALE DE POLICE TERRITORIALE, afin de garantir un niveau de formation adéquat.
Le Président National,
C. MICHEL