Homme d’affaire et homme politique, Bernard Tapie est mort des suites d’un cancer à l’âge de 78 ans. De nombreux hommages lui sont rendus ce dimanche. Voici celui du Président de la République Emmanuel Macron.
Il aura eu mille vies. Homme d’affaires et homme politique, grande figure du sport, de la culture et des médias, Bernard Tapie s’est éteint aujourd’hui. Porté aux nues par les uns, voué aux gémonies par les autres, il dérangeait autant qu’il fascinait, parce qu’il enjambait toutes les barrières sur le chemin de sa réussite.
Sa naissance en 1943, dans le XXe arrondissement de Paris, d’un père ouvrier fraiseur et d’une mère aide-soignante, ne lui avait pourtant pas frayé une célébrité toute tracée. Porté par une énergie qui le poussait à empoigner le monde, à saisir sa chance à pleines mains, à embrasser tous les possibles, Bernard Tapie se forgea un destin hors du commun.
N’éprouvant pas l’appel brûlant d’une vocation, si ce n’est au succès, il allait emprunter tous les chemins que la fortune aurait à lui offrir. Il décrocha d’abord un diplôme de technicien en électronique, tenta sa chance dans la chanson puis dans les courses automobiles.
Mais c’est dans le monde des affaires que ce jeune Rastignac révéla tout son talent. Dans le sillage d’une première entreprise réussie de vente de téléviseurs, il multiplia les projets, rachetant ici et là des entreprises en faillite, souvent pour un euro symbolique, qu’il revendait quelques années plus tard pour des sommes colossales. Ainsi naquit l’empire Tapie, de presque rien, d’une audace folle, d’une soif d’action et d’une faim d’aventures qui lui gagna presque tout.
L’investisseur et l’entrepreneur talentueux devint dans la foulée une star du petit écran : lui qui avait commencé sa carrière en vendant des postes de télévision devint une grande figure de la petite lucarne. Le succès de son émission Ambitions, où il aidait des jeunes gens à monter leur entreprise en direct, en fit bientôt un roi des audiences.
Hâbleur, charismatique, séduisant, Bernard Tapie fut aussi ce grand patron d’équipes sportives qui en conduisit quelques-unes à la légende. Autour de Bernard Hinault, il fonda l’équipe cycliste La Vie claire qui mena le champion à sa cinquième victoire du Tour en 1985. Surtout, c’est avec l’Olympique de Marseille que Bernard Tapie fit des merveilles : l’équipe, rachetée en complète déshérence, ressuscita littéralement sous son égide. C’était la grande époque de Deschamps et de Desailly, de Barthez et de Cantona, de Boli et de Jean-Pierre Papin. Ce fut le temps mythique de tous les exploits et de tous les trophées : l’âge d’or de l’OM, qui devint au début des années 1990 quatre fois championne de France, et remporta en 1993 une Ligue des champions – la seule de toute l’histoire du football français.
Conjuguant son talent pour les affaires et sa passion du sport, Bernard Tapie racheta ensuite la marque allemande Adidas. Une nouvelle fois, le miracle s’opéra : l’entreprise, au bord de la faillite en 1991, redevint rentable en deux ans. L’as des affaires caracolait désormais en tête des plus grandes fortunes françaises.
Avec une insatiable ambition, il embrassa d’autres conquêtes, politiques, journalistiques, médiatiques. Durant la présidence de François Mitterrand, il devint successivement conseiller général des Bouches-du-Rhône, député français, député européen, puis ministre de la Ville dans le gouvernement de Pierre Bérégovoy.
A ses multiples casquettes, il ajouta celle de patron de presse, à la tête de quotidiens comme La Provence, Nice-Matin et Corse-Matin, celle de comédien aussi, qui se hissa en haut de l’affiche aux côtés de Fabrice Luchini et Pierre Arditi dans Hommes, femmes, mode d’emploi de Claude Lelouch. Il s’essaya au théâtre, apparut à la télévision dans le rôle du commissaire Valence et comme consultant sportif, enregistra des quarante-cinq tours sur des titres écrits par Didier Barbelivien.
A la légende dorée se mêlèrent les ombres d’une chronique judiciaire : des procès perdus, de lourdes condamnations – des décisions qu’il aura contestées toute sa vie.
Cet homme qui avait une combativité à déplacer les montagnes et à décrocher la lune ne déposait jamais les armes, et livra bataille contre le cancer jusqu’à ses derniers instants.
Le Président de la République et son épouse sont touchés par le décès de Bernard Tapie, dont l’ambition, l’énergie et l’enthousiasme furent une source d’inspiration pour des générations de Français. À sa famille et à ses proches, ils adressent leurs condoléances respectueuses.