Ces dix dernières années, Israël a progressivement accru les restrictions d’accès aux terres agricoles et aux zones de pêche de la Bande de Gaza, affectant directement les agriculteurs et pêcheurs du territoire palestinien et indirectement les 1,5 million d’habitants qui y vivent, indique un rapport rendu public jeudi par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et le Programme alimentaire mondial (PAM).
leurs obligations prévues par le droit humanitaire international
Basé sur une centaine d’entretiens réalisés entre mars et avril 2010, ce rapport examine l’impact humanitaire des restrictions de circulations imposées par l’armée israélienne aux Palestiniens de la Bande de Gaza.
Selon ce document, en dépit de son retrait unilatéral de Gaza en 2005, l’armée israélienne a étendu, au nom de la prévention des attaques de militants palestiniens, les zones interdites d’accès aux civils. Depuis 2008, ceux-ci sont ainsi totalement ou partiellement interdit d’accès aux terres situés à moins de 1.500 mètres de la ligne de démarcation et à 3 milles nautiques des côtes.
Conséquences de ces mesures, les habitants de Gaza sont privés de « 17% de leur territoire et de 35% de leurs terres cultivables ». En mer, les pêcheurs ne peuvent pas se rendre dans « 85% de la zone maritime à laquelle ils ont en principe droit selon les Accords d’Oslo ».
« Environ 178.000 personnes, soit 12% de la population de la Bande de Gaza, sont directement affectées par ces restriction imposées par les militaires israéliens », souligne le rapport.
Leurs auteurs dénoncent aussi la politique israélienne consistant « à ouvrir le feu sur les gens qui pénètrent dans les zones de circulation restreinte ». « Bien que ce soit en général des tirs de sommations, depuis janvier 2009 l’armée a tué 22 civils palestiniens et en a blessé 146 autres », écrivent-ils, avant de rappeler qu’Israël « n’a jamais informé la population affectée des délimitations exactes des zones d’interdiction de circulation ».
Le rapport met également en lumière « une autre technique utilisée par les militaires israéliens pour décourager l’accès aux terres des zones de restriction », qui consiste « à systématiquement aplanir les terres agricoles et à détruire les propriétés privés dans ces zones ». Selon le rapport, la valeur des terres et propriétés détruites s’élève à 308 millions de dollars, 75.000 tonnes de production potentielle sont également perdues, ce qui représente 50,2 millions de dollars de pertes de revenus chaque année pour les agriculteurs de la Bande de Gaza.
la diminution du nombre d’enfants inscrits dans les écoles
Après avoir passé en revue l’étendue des restrictions de circulations imposées par l’armée israélienne et les conséquences directes pour les agriculteurs et pêcheurs de Gaza, le rapport d’OCHA et du PAM examine les moyens mis en oeuvre par la population pour pallier ce manque de ressources alimentaires et financières, générer des sources alternatives de revenus et réduire les dépenses quotidiennes. Les auteurs s’alarment en particulier de certaines pratiques comme la réduction des quantités de nourriture consommées, le changement de régime alimentaire -moins de fruits, de légumes et de viande et plus de produits à haute teneur en sucre moins chers et plus facilement disponibles, la diminution du nombre d’enfants inscrits dans les écoles et une tendance plus forte des parents à marier leurs filles tôt.
« Ce régime a aussi des conséquences sur l’accès aux écoles, sept étant situées dans des zones de restriction de circulation. La sécurité des étudiants, la présence du personnel, la qualité de l’éducation offerte et le niveau de réussite ont été sérieusement affectés, en raison des tirs fréquents de l’armée israélienne destinés à empêcher des personnes de pénétrer dans ces zones, qu’ils s’agissent d’agriculteurs ou de militants armés », indique le rapport.
L’étude d’OCHA et du PAM souligne enfin que les zones de restrictions ont aussi un impact sanitaire grave, dans la mesure où elles empêchent la maintenance de stations d’épuration ou de production d’électricité de la Bande de Gaza. « Le retard entraîné par ces restrictions dans la construction de trois nouvelles stations d’épurations a contribué au déversement quotidien de 80 millions de litres d’eaux usées ou partiellement traitées dans la mer », relève en particulier le rapport.
Pour conclure, le rapport estime que les restrictions d’accès imposées à terre et en mer « doivent être levées autant que possible et de toute urgence ». « Toutes les parties doivent se soumettre à leurs obligations prévues par le droit humanitaire international et les droits de l’homme », demandent aussi leurs auteurs. Selon eux, le rapport montre également que l’aide humanitaire offerte à la population de Gaza « doit être plus vaste et mieux ciblée ».