Théâtre, chorégraphie, textes incisifs tantôt adossés à une bande sonore transcendante, vidéo en mode miroir hypnotique ; scrap TV mélange les genres pour un spectacle ô combien vivant. Le spectateur de Scraps TV bouscule le téléspectateur pour interroger ce qu’il reste d’acteur en lui.
Le thème n’est certes pas nouveau, mais ce spectacle renouvelle le genre. En jouant sur le dispositif tout d’abord. Le spectacle est un assemblage de « sujets » empruntant à l’écriture télévisuelle et qui se succédant démontrent les torsions que le « format » télévisuel fait subir au réel en le formatant pour qu’il rentre dans la boîte. Tout y est, la succession à un rythme effréné, le son qui omnubile, l’image qui décale en ombre portée le jeu des acteurs et distrait du fond, du discours.
Tant de cerveaux disponibles …
Pourvu qu’on les interpelle. Efficacité du jeu porté par trois acteurs – 2 femmes et un homme – qui a l’énergie nous déplacent : du registre du fait divers, à la relecture de « il était une fois blanche neige », conte contre compte d’audimat pour interroger in fine la distance qu’entretiennent le voyeurisme et l’indicible des horreurs du monde. Les acteurs s’engagent dans la déconstruction du mécanisme et la présence sur scène d’une actrice traduisant le texte en langue des signes nous déplace encore un peu plus. L’altérité est convoquée et ouvre un autre accès qui emporte le spectacle vers l’onirisme.
45 minutes de représentation au festival de rue de Ramonville, pour un spectacle qui en comporte plus d’une heure trente. On regrette, pour l’heure, que la troupe ne puisse présenter l’intégralité de son travail faute d’avoir trouvé une scène susceptible de les accueillir. On espère, à notre tour, un « déplacement » des théâtres toulousains pour laisser place à cette création au milieu des grosses machines déjà rodées. Une place pour le Scraps parce que la création ne se lit pas que dans la seule logique économique des industries culturelles.
Isabelle Bazet
photo (c) David Brunner-Collectif Carmen Blaix-Toulouse7.com